Mardi 19 juillet 2022, l’association MaMaMa basée à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) a annoncé qu’elle était menacée d’expulsion.
Par Dorine Goth
Publié le 20 juillet à 18h45
C’était la belle histoire du confinement. Depuis avril 2020, l’association MaMaMa vient en aide aux mères célibataires en développant des forfaits d’aide au quotidien contre la précarité infantile, menstruelle et féminine. En deux ans, la jeune association, basée à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), a été deux fois lauréate du Plan de relance, a collaboré avec Action contre la Faim et a reçu l’Ordre national du mérite.
Sommaire
Un appel sur les réseaux sociaux
Depuis le lancement de son activité, MaMaMA a établi une collaboration avec 150 centres de santé et 270 travailleurs sociaux dans neuf départements. Plus de 70 000 femmes et enfants ont été aidés en deux ans avec la distribution de 500 colis chaque semaine. Mais derrière la façade se raconte une autre histoire : faute de pouvoir payer le loyer exigé, l’association est menacée d’expulsion de ses locaux historiques de Saint-Denis.
Une occupation d’abord gratuite
Mardi 19 juillet 2022, l’association a lancé un appel à l’aide sur les réseaux sociaux. Depuis, il a reçu le soutien de la journaliste Léa Salamé, de l’animateur Nagui et des anciennes ministres Cécile Duflot et Élisabeth Moreno. « Je suis très heureuse de voir que la précarité menstruelle, infantile et féminine n’est pas ‘seulement une affaire de femmes’ et de voir qu’elle inquiète tout le monde », se réjouit Magali Bragard, co-fondatrice de l’association.
Peu après sa création, la Mairie de Saint-Denis confie à l’association un entrepôt sur le site des anciens ateliers de l’AB, pour la préparation et le stockage des colis alimentaires. Emploi autorisé grâce à une convention de prestations gratuites d’une durée de deux mois, renouvelable. Les locaux sont la propriété de l’aménageur public du territoire, la SEM Plaine Commune Développement, qui sera à terme détruit pour un projet urbain.
Un accord temporaire, selon la Ville
« Nous savions que l’occupation ne durerait pas. Mais l’accord a été renouvelé sans problème jusqu’en novembre 2020. A cette époque, il n’a plus été renouvelé, sans avoir eu d’explication », rapporte Magali Bragard. A cette époque, l’association aurait proposé à la Mairie de verser un loyer de 1.000 euros. « C’est le maximum que nous pouvons nous permettre, mais nous n’avons reçu aucune réponse », explique-t-il.
Finalement, après un an d’occupation sans droit ni titre, la municipalité a accepté en novembre 2021 de renouveler la convention. « Mais il nous dit que c’est la dernière fois, qu’ensuite il faudra recourir au SEM », rapporte-t-il. « Il a toujours été clair pour l’association que l’emploi libre lié au contexte d’urgence sanitaire ne pouvait être imaginé à temps », répondent la commune de Saint-Denis et la SEM dans un communiqué commun.
Un loyer jugé « impossible »
Ils disent « que l’association avait promis de chercher un autre local ou de signer un bail et de travailler sur son modèle économique et son projet associatif face à cette limitation qui viendra ». « La Mairie a laissé du temps à cette démarche et s’est positionnée en accompagnateur, en soutenant par exemple la réponse à un appel à projets de la Région pour financer une future location », poursuivent-ils. « Les fonds étaient destinés à l’investissement. Nous ne pouvions pas les utiliser pour les dépenses de fonctionnement », reproche l’association, qui soutient que le maire Mathieu Hanotin « a promis qu’ils ne nous demanderaient jamais de loyer », lors d’une visite des lieux en février 2021.
Fin 2021, la SEM a finalement exigé le paiement d’un loyer afin d’établir un contrat de travail précaire de deux ans. « Lors de cette réunion, la SEM nous a demandé un loyer de 18 000 euros et nous a imposé pour la première fois des restrictions. C’est impossible pour nous. L’affaire n’était pas terrible », se désespère-t-il.
Sept jours pour quitter les lieux
En coulisses, des négociations sont en cours pour trouver une solution. « On nous a proposé l’utilisation de la moitié de l’espace pour moins de loyer mais nous n’avions plus accès à la porte. Ce ne serait pas pérenne », a-t-il dit, cela signifie un loyer conséquent de 14 000 euros avec les taxes mensuelles. C’est vraiment le choix de l’association », affirment pour leur part Saint-Denis et la SEM.
Depuis le début du mois, les visites d’huissiers et les envois de lettres recommandées se sont multipliés, jusqu’à l’envoi, en début de semaine, d’une lettre recommandée de la SEM leur ordonnant de quitter les lieux dans un délai de sept jours . « C’est impossible ! Que fait-on de tous les produits stockés ? Et au-delà du matériel, il y a des gens qui nous font confiance en ce moment. Nous distribuons des colis dans neuf départements », insiste Magali Bragard. « Après six mois de tentatives de conciliation infructueuses et 27 mois de libre disposition de 1 200 m², la SEM et la Mairie de Saint-Denis supposent être arrivées au bout du chemin de la collaboration », estiment-ils.
Aujourd’hui, Magali Bragard se dit « ouverte à toutes les solutions qui lui permettent de continuer ». « A Saint-Denis, ce serait merveilleux », projette-t-il. Une réunion devait se tenir mercredi 20 juillet « pour accompagner MaMaMa dans sa recherche de nouveaux locaux en Île-de-France ». « En tout cas, toute cette histoire va être une grande déception », déplore le co-fondateur de l’association.