Pour reprendre les mots d’Émile Nelligan, le poète oublié d’un peuple moribond, c’est un grand vase taillé dans l’or massif.
Le nom de ce bateau de luxe ?
Dans la dernière heure du mois dernier, les Occidentaux se rassemblent sur le pont pour célébrer l’arrivée de la nouvelle année.
Mais le cœur n’est pas à la fête, malgré le champagne qui coule à flot.
Premièrement, les milléniaux ont pleuré parce que l’invitation au cocktail n’incluait pas l’écriture.
Ensuite, les enfants et les parents paniquent car une panne d’Internet les obligera à se parler pendant le dîner.
« Qu’est-ce qu’on se dira, pour faire hurler une mère désespérée ? Cela fait six ans que nous ne nous sommes pas parlé, je ne me souviens plus du nom de mon plus jeune ! »
Pour ajouter la moindre question : « Putain, genre, tsé, WTF, OMG, quelle erreur, LOL, BRB ! »
Enfin, isolés dans leur hutte, les vieux nous demandent de venir changer leurs couches, mais personne ne les entend car ils chantent des chants de Noël louant l’enfant Jésus à tue-tête (c’est pourquoi ils ont mis le volume au maximum) .
A minuit, une pluie de confettis s’abattra sur ces enfants gâtés, et une star hollywoodienne, vêtue d’un superbe T-shirt Tom Ford à l’effigie du président ukrainien, descendra de son hélicoptère privé pour leur souhaiter un simple, éco- convivial, simple. année socialement responsable.
Avant de remonter dans son bolide ailé et de s’envoler pour Sao Paulo, où la star présentera sa première production : un documentaire époustouflant sur la simplicité volontaire.
Sont-ils tous occupés alors ?
Au sous-sol, parce que c’est la fête.
Les travailleurs de Russie et de Chine aiguisent leurs armes, attendant que le Grand Après-midi prenne enfin le relais ! – le sens du revêtement.
Dire à leurs dirigeants Xi et Vladimir (ou est-ce Vladimir et Xi ?) : « Regardez les Occidentaux qui marchent sur le pont et regardez les dirigeants qu’ils se sont donnés ces dernières années : un acteur jouant le premier ministre du Canada, un technocrate qui s’écoute en France, et Aux États-Unis, un bouffon qui s’en prend sans cesse aux institutions démocratiques de son pays, suivi d’un octogénaire presque sénile.
« Nous vous le disons, amis : le fruit va bientôt mûrir. Il suffit d’un petit coup pour faire de toi le roi du monde… »
SUR TERRE, SUR MER ET DANS LES AIRS
Dans la comédie noire Unfiltered, qui a remporté la Palme d’or à Cannes cet été, le cinéaste suédois Ruben Ostlund compare l’Occident à un bateau de croisière rempli de bourgeois décadents.
Dans le film Passenger Lovers, le réalisateur espagnol Pedro Almodovar compare l’Occident à un avion où les passagers de première classe chassent l’ennui en organisant des orgies.
Et dans le film Le transperceneige, le cinéaste nord-coréen Bong Joon-ho compare l’Occident à un train avec les pauvres affamés et les riches eux-mêmes.
Nous échangerons bientôt nos meilleurs vœux.
Suis-je le seul à ressentir une certaine anxiété pour l’année prochaine ?