Crise énergétique : le changement d’heure, bon ou mauvais plan ?

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Le dernier dimanche d’octobre, nous passerons à l’heure d’hiver. Dans la nuit du samedi 29 octobre au dimanche 30 octobre 2022, la France, ainsi que ses voisins européens, reculera d’une heure. A 3 heures du matin, il sera donc 2 heures du matin. Cette mesure est appliquée depuis les années 1970 en France dans un souci d’économie d’énergie. Un dispositif évident en pleine crise énergétique ? Pas si sûr…

Économies d’énergie et changement d’heure

Alors que tout le monde travaille pour économiser l’énergie, y a-t-il un regain d’intérêt pour le passage à l’heure d’hiver ? Cet appareil, censé disparaître en 2020, a profité de la pandémie. En effet, sa suppression a ainsi été reportée. Cette année encore, nous avons donc changé d’heure d’été et le dernier dimanche d’octobre 2022, nous passerons à nouveau à l’heure d’hiver.

Le changement d’heure n’est pas nouveau. Celle-ci remonte au 18ème siècle. C’est Benjamin Franklin qui a eu l’idée de tordre le temps, pour que les activités coïncident avec la durée d’ensoleillement. .

La théorie est passée à la pratique au début du XXe siècle. En 1916, le Royaume-Uni, l’Irlande, l’Allemagne et la France mettent en œuvre cette idée, alors que l’Europe est au cœur de la Première Guerre mondiale. L’objectif était alors d’économiser la consommation de charbon, en réduisant l’éclairage. Après la Seconde Guerre mondiale, la mesure a été abandonnée.

Cependant, il fait son grand retour en France en 1975, suite au choc pétrolier de 1973-1974. A cette époque, l’électricité était alors produite par des centrales électriques au fioul lourd. L’explosion des prix a poussé le pays à user d’astuces pour économiser cette énergie. C’est ainsi que l’heure d’été entre à nouveau en jeu, qui est ensuite remplacée à l’automne par l’heure d’hiver.

La France n’est pas la seule à changer de temps. L’ensemble de l’Union européenne est concernée par ce processus. Depuis 1998, les pays de l’UE ont tous opté pour un changement d’heure. En 2001, une directive a permis d’harmoniser les horaires. C’est ainsi que l’heure d’été est appliquée le dernier dimanche de mars, en ajoutant une heure au cadran. Pour l’hiver, le changement d’heure s’applique le dernier dimanche d’octobre, en soustrayant une heure.

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L’Europe demeure sceptique

Pourtant, cette tradition a souvent été critiquée dans tous les pays européens. Le gain énergétique est jugé trop faible, si on le compare aux autres conséquences du changement d’heure.

Parmi les impacts décriés du changement d’heure on peut citer :

A l’inverse, qu’apporte cet appareil ? Selon la dernière étude de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) lancée en 2010, le changement d’heure a permis d’économiser environ 440 GWh d’électricité en 2009. Cela représente la consommation électrique annuelle de 800 000 foyers français.

Cela évite également l’émission de 44 000 tonnes de CO2. L’ADEME estimait à l’époque que ce gain énergétique devrait cependant diminuer avec le temps. Il a prédit une économie plus faible d’ici 2030, qui passerait alors à 340 GWh par an.

Pour vérifier son impact et surtout s’enquérir de la volonté des Européens de voir perdurer ce système horaire, l’UE a lancé en 2019 une consultation en ligne auprès des citoyens. 4,6 millions de personnes ont partagé leur avis sur le changement d’heure. 84% d’entre eux expriment leur souhait de voir disparaître le changement d’heure afin de rester en phase avec l’heure d’été toute l’année. Le vote des citoyens européens a convaincu le Parlement européen d’autoriser la suppression du changement climatique, à partir de l’année 2021. Mais la pandémie a changé l’agenda européen. La Commission européenne n’a pas pu se réunir pour voter sur sa mise en œuvre. Puis en 2022, le sujet n’a pu être évoqué. Alors cette année encore, nous allons reculer nos horloges d’une heure fin octobre.

L’Europe n’est pas la seule à s’être interrogée sur le changement d’heure. Des pays comme la Chine, l’Afrique du Sud, l’Argentine, la Tunisie, l’Egypte et l’Ukraine ont décidé de s’en passer. L’année prochaine, les États-Unis abandonneront le changement d’heure pour s’installer uniquement sur l’heure d’été.

Une économie minime mais nécessaire ?

Les polémiques autour du changement d’heure semblent dépassées. La crainte d’une pénurie cet hiver et dans les années à venir a même fait oublier la suppression de cette mesure.

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Nous vivons une nouvelle crise énergétique qui fait écho aux crises rencontrées lors de la Première Guerre mondiale ou à la crise pétrolière de 1973-1974. Le changement d’heure avait été mis en place justement pour répondre à ce type de contexte. Aujourd’hui, il pourrait donc trouver un sens.

Si on ne regarde que les économies d’énergie et les économies financières, le changement d’heure peut être intéressant. L’économie de 400 GWh annuellement et à plus long terme de 340 GWh, même si elle reste faible, n’est pas négligeable en temps de crise.

A ce titre, on peut comparer l’impact du changement d’heure à certaines mesures du plan sobriété énergétique proposé par le gouvernement.

Parmi elles, le déblocage d’une enveloppe de 150 millions d’euros pour réaliser de petits travaux de rénovation dans les bâtiments. Ce fonds permettra d’installer des chaudières économes en énergie, de renforcer l’isolation, d’installer des ampoules LED et des thermostats intelligents. Cette mesure devrait permettre d’économiser 250 GWh par an. Des économies inférieures à celles permises par le changement d’heure.

En 2010, l’Ademe estimait certes que les économies d’éclairage obtenues grâce au changement d’heure diminueraient d’ici 2030. Or, s’agissant des usages thermiques, c’est plutôt l’inverse qui devrait se produire. L’Ademe part du principe qu’en 2030, il y aura une marge à gagner sur les usages thermiques, notamment sur la climatisation en été.

Le plan sobriété énergétique est un cumul de ces petites mesures anti-gaspillage, qui ensemble permettront une économie estimée à 30 000 GWh par an. Reste à savoir si ce petit avantage offert par le changement d’heure est aussi indispensable que les autres mesures visant à réduire les besoins énergétiques de la France.