Nous avons eu le plaisir de nous entretenir avec l’auteur primé Quai des Orfèvres 2017 de Mortels Trafics, en cours d’adaptation en Overdose, réalisé par Olivier Marchal et dont la première sur Amazon Prime est prévue le 4 novembre. A noter que le 02 novembre est sorti le livre Mortels Trafics, avec pour titre Overdose et en couverture l’affiche du film de l’éditeur Le livre de poche. Pierre Pouchairet a livré son livre primé et l’adaptation suivante avec une grande passion.
Pierre, ton parcours en quelques mots ? En France et à l’étranger ?
Comme beaucoup de gens le savent, je suis un ancien policier. J’ai débuté dans la police judiciaire de Versailles en 1981, alors petite anecdote, un an après Olivier Marchal, puisque nous nous y sommes rencontrés. J’y suis resté 6 ans avant de m’installer à Nice. A Versailles, j’étais dans un groupe qui s’occupait du crime organisé, des meurtres en général, puis j’ai passé 12 ans à Nice, où j’ai traité du trafic de drogue à moyenne et grande échelle. Ensuite, j’ai eu envie de changer d’ambiance, on m’a proposé de représenter la Police française à l’étranger, je suis donc allé au Liban 3 ans de suite, et en Turquie 3 ans. Je suis rentré en France pendant un an et demi à Grenoble. Puis je suis allé en Afghanistan pendant 4 ans et demi et au Kazakhstan pendant 2 ans. Lors de mon séjour en Afghanistan, j’ai rencontré celle qui est maintenant ma femme, une bretonne. Il continue à travailler à l’étranger. J’ai passé près de 4 ans avec lui en Cisjordanie et nous avons passé 4 ans au Cameroun.
Vous avez donc travaillé avec Olivier Marchal ?
Absolument, Olivier était dans le même département que moi. Nous étions collègues. Comme moi, il était sur les lieux du crime à Versailles. Il a un an de moins que moi, mais il a rejoint la force un an plus tôt. Je me souviens d’un mec super marrant qui s’intéressait déjà au cinéma à cette époque. Il avait travaillé comme figurant sur un film avec Claude Brasseur, prenait des cours de théâtre si je me souviens bien, et était aussi cinéphile.
Quant à vous, l’envie d’écrire a-t-elle déjà croisé votre chemin en tant que policier ?
En fait non, je ne me voyais pas comme un romancier. Mais dans la police, nous écrivons beaucoup et j’étais toujours celle qui était joyeusement coincée à la fin des rapports d’enquête. J’avais un style qui me plaisait, mais c’était professionnel. L’envie d’écrire m’a pris après mon séjour en Afghanistan, une sorte de témoignage que j’ai laissé à ma fille.
Il y a donc un prix sur le Quai des Orfèvres. J’ai lu que vous l’avez comparée à gagner Miss France… était-ce une année assez incroyable alors ?
Oui, quand j’ai commencé à écrire, après les deux premiers éditeurs, puis j’ai eu un contrat avec les éditions Jigal pour 5 romans, et au milieu de ces 5 romans, j’ai tenté le prix du quai des orfèvres, j’ai eu de la chance. . C’était un prix un peu spécial cette année, à cause des attentats de Paris l’année précédente, car il n’y avait pas de remise officielle. C’est aussi la dernière année qui s’est passée au 36 quai des orfèvres, avant le déménagement. Ils ont voulu donner un peu plus d’éclat à cette cérémonie en invitant Alain Delon et Jean-Paul Belmondo… Pour quelqu’un de mon âge, Delon et Belmondo, ce sont de grosses bêtes de cinéma, c’était juste un moment magique. Après m’avoir entendu dire que Miss France c’est un peu, ce n’est en fait pas ma déclaration, c’est mon prédécesseur au quai qui me l’a dit. C’est vrai que pendant un an, tu vas dans un salon avec ce prix, tu as des livres partout, tu fais des ventes que tu ne feras plus jamais. En novembre, vous passez le flambeau. Ce fut une année magique. Chez Jigal, je vendais environ 1 200 livres par an avec un titre, où vous gagnez 100 fois plus que vous ne le feriez normalement. Ça c’est le bonheur.
Pour Mortels Trafics, à un moment tu t’es dit que tu pourrais t’intégrer, tu l’as vu venir ?
J’avais déjà un roman en option, mais il n’était pas terminé, c’était The Not-So-Holy Ground (2014). Nous espérions et finalement non. Ensuite, dans mon écriture, beaucoup de gens y voient une écriture cinématographique. Un blog qui n’existe plus, quatresansquatre.com, où Patrick Cargnelutti écrivait, disait que j’avais écrit « caméra sur l’intérieur ». J’ai vraiment aimé cette photo. Dire que mon livre serait adapté de ça, non, je ne le pensais pas. Je l’ai vu venir à un moment donné. D’abord, il a été choisi par une société de production qui espérait faire une série avec lui, et a demandé à Olivier de s’occuper de lui. Et au bout d’un an et demi, il n’a pas trouvé de repreneur auprès des chaînes de télévision, le projet a donc été abandonné. Mais Olivier a aimé le livre, pas parce qu’on se connaissait, pour être honnête, parce qu’il ne se souvenait plus de moi. Mais il a pris ce projet en main en le proposant à Gaumont, et puis, je ne sais pas trop comment ça s’est passé, mais Amazon l’a repris et c’est devenu un film et pour moi c’est juste magique.
Pourquoi pensez-vous qu’il est plus facile d’adapter une histoire à un film qu’une autre ?
Je pense principalement que le mot est adaptation, donc ce n’est pas collé à l’écriture du livre. Je pense que tout peut être adapté si vous faites quelque chose de plus pour le spectateur que pour le lecteur. Une adaptation, l’auteur du film l’assume et le voit forcément différemment de ce qu’en a fait l’écrivain et c’est tant mieux.
36 est un personnage du livre, en particulier les 36 escaliers décrits comme légendaires parmi les chercheurs, pouvez-vous le confirmer ?
Oui, je peux confirmer, mais dans le film, cela ne se passe pas du tout en 36. C’est mis à jour, donc 36 se déroule à Bastion. On n’est plus comme l’ancien immeuble, il y a un ascenseur… (rires…)
A un moment vous évoquez la police, mais sûrement, non seulement, « une ambiance très particulière de gens qui tournent le dos à la mort et à la souffrance », c’est aussi un hommage à certaines professions à forte charge mentale ?
Je pense que ça coche tous les détectives des brigades criminelles ou sur la voie publique. Olivier est d’ailleurs un exemple frappant de ceux qui ont été particulièrement touchés par cette ambiance morose dans nos travaux. Puis je relativise. Infirmiers, médecins en oncologie, services de fin de vie, pompiers… Il existe de nombreux métiers où la mort est fréquente et extrêmement effrayante. Sortir avec des collègues une fois l’affaire terminée permet de tout relativiser, car le plus important est de ne pas rapporter tous les drames que l’on rencontre chez soi au quotidien.
Ce que tu dis là et très présent dans le livre, y a-t-il aussi l’importance du groupe, du collectif ?
Absolument, car vous vivez ces moments ensemble. Je viens d’une époque où il n’y avait pas ou très peu de psychologues dans la police. Ce dont les gens parlaient, c’était l’ambiance où ils pouvaient discuter de ce qu’ils avaient vu avec des collègues, avec le chef de service.
Cette histoire de Mortels Trafics est-elle largement ou très vaguement inspirée de faits réels, un recueil de mémoires de recherche ?
C’est une collection d’événements réels. Et dans Mortels Trafics, le personnage de Léane est assis dans mon bureau quand j’étais sous drogue. Plus ou moins son équipe, son ministre semblent être des gens que je connais. Puis, comme dans le livre, attendre de la drogue à la frontière de Perpiña, je l’ai fait plusieurs fois quand j’étais à Nice. Même les trafiquants ressemblent plus ou moins aux gens avec qui j’ai travaillé. Toute cette ambiance professionnelle, nous sommes dans le monde réel. Quand tu vas à la morgue, la prise de contact des fonctionnaires, l’enquête… C’est ce à quoi je fais écho dans mon livre et ce que j’essaie de faire dans mes livres, et ce qui me dérange souvent avec d’autres collègues ou au cinéma. pas tant sur le respect des procédures à la lettre que sur les relations humaines souvent mal décrites. L’ambiance d’une équipe, le ministre d’une équipe de police judiciaire, c’est en même temps un coach, c’est plus une équipe sportive. Tout le monde devrait avoir du respect. Vous n’avez aucun pouvoir sur vos collègues lorsque vous êtes le patron, vous ne pouvez pas les virer, les promouvoir. Il faut donc vraiment de la cohésion dans l’équipe.
Dans cette ambiance que vous décrivez, où les retrouvez-vous au cinéma ?
Je trouve ces références dans L.627 (1992). Je pense que c’est presque un documentaire sur le travail de la police, sur les stupéfiants à l’époque. On retrouve aussi beaucoup de cette ambiance de groupe dans La Balance (1982). Pas mal non plus dans Police de Pialat (1985), comme dans Polisse de Maewenn (2011). Également sous-lieutenant (2004). Et aussi en termes de séries, la série type est Engrenages (2005-2020).
Vous avez cette première vie professionnelle en commun avec Olivier Marchal, pensez-vous qu’elle soit essentielle pour que le souci du détail que vous développez dans le livre et ainsi soit au plus proche de la réalité ?
Oui, pour être plus proche de la réalité. Ensuite, il y a différents lecteurs. Certaines personnes aiment les thrillers procéduraux, alors elles sont heureuses quand elles lisent mes livres. Pour obtenir le prix sur le Quai des Orfèvres, j’ai beaucoup insisté sur l’aspect procédural. Dans mes autres romans, je suis beaucoup plus léger là-dessus. C’est peut-être trop, mais il faut coller à la réalité, et il est évident que c’est mon parcours professionnel qui me permet d’illustrer mes livres.
Pour l’adaptation, en lien avec Olivier Marchal, il vous a contacté ? comment a-t-il été créé
Non, mon prix Quai des Orfèvres est édité par Fayard, qui avait les droits audiovisuels, et ce sont eux qui ont tout négocié avec Gaumont et Amazon. C’est alors qu’on a demandé à Olivier d’être le directeur de la photographie de ce film. C’est ainsi que nous avons fini par nous rencontrer, puis les liens sont revenus, même si nous ne nous étions pas vus depuis 40 ans.
Et comment vous y êtes-vous intégré (ou pas) ?
Vous avez toujours le droit de voir le script, vous pouvez commenter. En fait, ils n’ont pas besoin d’y réfléchir, mais chaque remarque que j’ai pu faire a été, pour une fois, prise en compte par Olivier.
Je suppose que vous avez vu le film ? cela reflète-t-il Frustré par votre histoire ?
Je l’ai vu deux fois. Pas une fois de plus avec la dernière édition, et encore une fois. J’étais très excité. Je ne vois pas cela comme une possible frustration. Il y a toujours des choses que j’aurais aimé pouvoir trouver dans le film, mais c’est quand même une excellente adaptation. Il y a toute une création d’Olivier et tout l’esprit du livre est là. L’histoire a été légèrement révisée. Avec des personnages plus présents dans le film que dans mon livre, d’autres en retrait. Mon seul regret est que je perds les noms de mes personnages du livre, mes personnages ne ressemblent pas physiquement au film. Léane, qui est devenue un personnage récurrent dans mes livres, ne ressemble pas physiquement à Sarah, bien que le personnage soit là.
Sans spoilers, le personnage de Raynal, qui réalise une infiltration spectaculaire dans le livre, est-il plus présent dans le film ?
Oui, il est très important dans le film par rapport au livre. Dans le livre, il reste dans l’ombre du début à la fin. C’est un personnage fort du film. Pour ma part, je suis un ancien agent secret, j’ai suivi la première formation dispensée dans ce domaine. Aujourd’hui, les infiltrations sont plus graves qu’à mon époque. Aujourd’hui, cela peut être beaucoup plus long, avec tous les problèmes de sécurité potentiels. En allant au niveau Raynal, je ne suis pas sûr qu’on soit allé aussi loin. L’agent doit être bien formé et ne pas prendre d’initiative, il est comme un outil policier, pour ne pas risquer sa vie ou le succès de l’enquête.
Cette adaptation vous a-t-elle donné envie de scénarios maintenant ? Ou d’autres projets d’écriture ?
Je continue à écrire comme j’ai toujours écrit. Lorsque je travaillais sur des scripts, l’option aurait dû se présenter, mais je ne l’ai pas cherchée. L’écriture de scénario, d’après ce que j’ai vu, semble plus simple qu’un roman, mais ce qui change, c’est que votre écriture est confrontée au quotidien au producteur, à toute l’équipe du film. Ce que vous écrivez le matin est immédiatement partagé le lendemain, et ainsi de suite. C’est moins littéraire, mais la difficulté c’est qu’il y a tout un monde derrière qui imagine déjà ce qui est possible ou pas à l’écran et dépend beaucoup de votre écriture. les censeurs
Y a-t-il quelque chose d’important pour vous qui n’a pas été dit ?
En fait, j’ai un personnage récurrent, Léane Vallauri. Le livre a engendré toute une série, éditée chez Palémon, où il n’est plus à la PJ de Nice mais à Brest, maintenant que j’habite en Bretagne, et on peut retrouver son personnage dans 10 autres romans qui sont venus depuis. dehors J’ai publié un livre, toujours à Palémon, il y a 3 ou 4 mois, intitulé Mortels Trafics, comme on l’appelle Mortels Déclics, qui se déroule en partie à Toulouse, où Braghanti (le méchant de Mortels Trafics) a été emprisonné. maison d’arrêt de Murets, et il tentera de s’évader de cette prison, et Léan fera tout pour le retrouver s’il s’évade. C’est une extension de Mortels Trafics.