Les banques ont depuis longtemps la mainmise sur le marché de l’assurance emprunteur. Ni le développement d’offres alternatives ni les lois successives visant à faciliter la tâche des ménages désireux de jouer à des jeux compétitifs n’ont jusqu’à présent rendu impossible une véritable remise en cause de cette position monopolistique. Mais là où les lois Lagarde, Hamon et Bourquin ont échoué, la loi Lemoine espère enfin changer la donne.
Un monopole de fait
En effet, les établissements bancaires ont un avantage sur leurs concurrents externes car ils proposent aux candidats des biens pour souscrire leur assurance emprunteur en même temps que leurs offres de crédit immobilier. Cette protection, qui vise à garantir le paiement des cotisations mensuelles en cas de décès, d’invalidité ou encore de perte de travail, est en effet importante pour obtenir un financement. Cependant, une fois le contrat signé, il est très rare de le retirer.
Selon un rapport publié en 2020 par le Comité consultatif du secteur financier (CCSF), 88 % des contrats sont détenus par les banques, ce qui laisse une faible proportion pour les contrats alternatifs distribués en externe par les intermédiaires délégataires d’assurance. .
De gros enjeux financiers
Selon une enquête 2021 de l’UFC-Que Choisir, sur les 7 millions de Français qui ont un crédit immobilier, 80% ignorent les frais d’assurance de leur emprunteur. Pourtant, avec 6 milliards de cotisations annuelles, les enjeux financiers sont loin d’être négligeables. Ainsi, choisir un délégataire d’assurance vous permettra d’économiser en moyenne 10 000 euros, selon une étude de 2020 du courtier spécialisé Sécurimut (filiale de la Macif).
Au-delà de l’acquisition du pouvoir d’achat, c’est l’accès au crédit qui peut être facilité ou au contraire entravé, comme le souligne Sandrine Allonier, directrice des études du réseau d’intermédiation de Vousfinancer : « Depuis la recommandation du Haut conseil pour la stabilité financière, et même d’autant plus qu’elle est juridiquement contraignante, l’assurance de prêt, qui est prise en compte dans le calcul du taux d’endettement, devient un problème pour l’emprunteur.Elle peut représenter jusqu’à 2 points, et donc le pourboire de dossier hors dette de 35% devrait à ne pas dépasser. » Et le spécialiste ajoute : « Si introduire plus de concurrence sur le marché cela contribue à faire baisser les prix, ce qui est une excellente nouvelle pour les emprunteurs. Surtout maintenant pour compenser, au moins en partie, la hausse des taux de crédit. »
La loi qui fait la différence
L’Etat s’est longtemps fait pour faciliter les changements d’assurance des emprunteurs. En 2010, la loi Lagarde a permis de se couvrir en dehors de la banque, à condition d’offrir des garanties équivalentes, lors de l’obtention d’un crédit. Depuis la loi Hamon de 2014, vous disposez d’un an à compter de la signature pour modifier votre contrat. Et au-delà de ce délai, c’est un arrêt annuel mis en place dans le cadre des amendements Bourquin de 2018.
Face à ces manquements statutaires successifs, la loi Lemoine du 28 février 2022 prévoit une fermeture infra-annuelle pure et simple. A partir de ce moment, l’emprunteur peut remplacer l’assurance de prêt à tout moment, sans attendre l’anniversaire.