« J’aimerais pouvoir sourire » : plus d’un an après, le blues de…

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Le 6 octobre 2021, l’ARS Bourgogne-Franche-Comté a annoncé la fermeture des deux centres Proxidentaire situés à Chevigny-Saint-Sauveur, près de Dijon

, et à Belfort. Violation des règles d’hygiène, mutilations volontaires de patients, arnaques, etc. Les accusations sont nombreuses contre cette chaîne de centres dentaires low cost qui a mutilé plusieurs milliers de Français.

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« À chaque fois que j’allais dans ce cabinet, je ressortais avec de nouvelles dents infectées »

A cette époque, des associations se sont créées dans tout le pays pour écouter la souffrance des victimes et demander réparation. Une procédure judiciaire est en cours aujourd’hui

, mais la souffrance est toujours présente. « Nous attendons toujours. Nous n’avons pas été indemnisés, ni suivi psychologiquement. Pour moi, rien n’a changé ». Adrien*, 30 ans, est livreur à Dijon. Fin 2020, après un mal de dents, il passe par le cabinet Proxidentaire à Chevigny-Saint-Sauveur. Après plusieurs rendez-vous, il y laissera deux dents, et beaucoup d’argent.

« A chaque fois que j’allais dans ce cabinet, j’en ressortais avec de nouvelles dents infectées. Quand la douleur est apparue à la troisième dent, j’ai préféré aller aux urgences » se souvient Adrien. C’est là que la gravité de la situation lui est expliquée. Choqué, le jeune homme décide de porter plainte, comme de nombreuses victimes. Les témoins s’accumulent, une information judiciaire est ouverte en octobre 2021.

« On se sent comme du bétail »

Mais l’affaire traîne en longueur, et les blessures morales et physiques des Dijonnais ne disparaissent pas. « J’ai encore deux gros trous sur les côtés de mes dents. Ça se voit beaucoup. Je ne peux pas parler sans que mes yeux me collent à la bouche. J’ai arrêté de sourire, je garde les lèvres fermées » explique Adrien, battu.

Cependant, un soutien national aux victimes a été mis en place. La Caisse primaire d’assurance maladie et la Sécurité sociale ont repris les dossiers médicaux. Mais dans le cas d’Adrien, cela a aggravé les choses. « Il y a quelques semaines, j’ai ressenti une nouvelle douleur à une dent déjà abîmée par le Proxidentaire. La Sécurité Sociale m’a pris rendez-vous au centre dentaire Dentego à Dijon. Depuis, c’était pire. Le lendemain de l’intervention, ma joue est devenue J’ai dû m’arracher les gencives moi-même pour chasser la puanteur… J’ai l’impression de revivre le deuxième Proxidentaire » poursuit le jeune homme.

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Aujourd’hui, Adrien se sent abandonné par les autorités, et a perdu ses petits espoirs de retrouver une vie normale : « On se sent comme des animaux. Aucune réparation n’a été faite. C’est horrible. Je vis dans la peur de perdre toutes mes dents ».

« Avec 16 dents limées, je ressemblais à un requin »

Pour continuer le combat, le jeune homme a rejoint le collectif d’usagers Proxidentaire de Chevigny-Saint-Sauveur, qui regroupe 160 victimes de ce centre, réunies sur Internet. Sa présidente, Laetitia Beaudeau, blâme également ce coup : « Je suis un peu fâchée de la tournure que prend cette affaire. Pour mutiler, frauder et exercer de manière illégale, Proxidentaire a duré moins de temps que ça ».

Autre difficulté : retrouver toutes les victimes : « On a affaire à une population très vulnérable. Certains ne parlent pas bien le français, explique-t-elle. Sur mon groupe Facebook, je n’ai que 160 membres, alors que la CPAM calcule que plus de 3 500 personnes ont visité le Centre Proxidentaire de Chevigny. Je ne touche pas tout le monde. Il y a beaucoup de victimes qui sont encore hors radar ».

Et il souffre en silence. Comme Yohan, depuis de longs mois. Ce serrurier de 35 ans, installé à Venarey-les-Laumes, s’est également rendu au Proxidentaire de Chevigny-Saint-Sauveur pour soigner un mal de dents en décembre 2020. « J’avais besoin d’un rendez-vous rapide, et puis la consultation n’était pas chère. » il rappelle. Si son mal de dents est bien traité, on lui propose aussi de poser des couronnes, prétextant que ses dents sont en mauvais état. « Je ne suis pas dentiste, donc je leur ai fait confiance. A cause de ça, ma complémentaire santé a dû débourser 9 000 euros et je me suis retrouvé avec 16 dents cassées. Je suis comme un requin », confie-t-il.

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Quelques jours plus tard, le serrurier ressent les premières douleurs. Il appelle alors le centre dentaire, et tombe sur un répondeur qui lui annonce la fermeture du lieu. Plus tard, une lettre de l’ARS lui dit la vérité sur Proxidentaire

Une loi pour contrôler l’installation des centres dentaires low cost

, et l’inviter à faire des analyses de sang pour vérifier son état de santé. « C’est là que j’ai réalisé que mes dents étaient abîmées. »

Commence alors ce que Yohan lui-même appelle « la descente aux enfers ». « La douleur était trop forte, je voulais la thétiser. J’avais déjà eu des problèmes d’alcool dans le passé, alors très vite j’ai recommencé à boire pour faire face à la douleur. Du coup, j’ai perdu mon permis de conduire et mon travail le mien. C’est impossible de boire quelque chose de chaud mais aussi de froid, de manger du pain ou un sandwich. Le pire, c’est que mes enfants avaient peur de moi quand je leur souriais », souffle-t-il. il est avec des émotions.

Si sa situation a été arrangée, « grâce à un dentiste courageux qui a réparé ma prothèse », avoue Yohan : « quand ça descend si bas, ça remonte, c’est pas facile. Je ne retrouverai jamais mes dents avant ». Il est également irrité par un soutien insuffisant. « On m’a promis une visite chez un expert pour évaluer les dégâts causés par le Proxidentaire. J’attends toujours. »