Le snus, ce tabac à chiquer que les jeunes (et les footballeurs) adorent

Photo of author

Rédacteurs passionnés de culture, d'actualité et nouvelles de tout genre

Le snus est un tabac qui ne peut pas être fumé. Présenté sous forme de poudre conditionnée dans un sachet blanc, il se place entre la gencive et la lèvre supérieure. Il peut être conservé ainsi quelques minutes ou plusieurs heures. Une question de goût. Venu tout droit de Suède, le snus rencontrera de plus en plus de succès auprès des jeunes générations, et pas seulement auprès des fumeurs, influencés (en partie) par les réseaux sociaux qui en font la promotion et par certaines stars du football.

Faites défiler TikTok pour découvrir la multitude de vidéos qui évoquent le snus. Cette poudre de tabac est souvent présentée en sachets (comme le thé) stockés dans des boîtes rondes colorées. Récemment, il en parlait à travers l’équipe de France de football. A bord de l’avion qui l’emmenait au Qatar avec ses amis, Karim Benzema (qui a depuis été contraint d’abandonner la compétition pour cause de blessure) s’est pris en photo avec Marcus Thuram et l’a posté sur Instagram. On peut voir que ce dernier a une boîte de snus avec lui. Et quand il a republié la photo de Benzema sur ses propres réseaux sociaux, il l’a cachée avec un emoji d’avion. Il faut dire que le snus est interdit dans l’Union européenne depuis 1992, à l’exception de la Suède qui a le droit de le vendre sur son territoire, mais pas de l’exporter.

Marcus Thuram n’est pas le seul footballeur à être vu avec une boîte à snus ou à la prendre. Sur TikTok, plusieurs vidéos rassemblent des footballeurs internationaux qui se livrent à cette pratique (images plus ou moins à l’appui). Zlatan, Mark Gillespie, Tammy Abraham, Victor Lindelof, Kenneth Hoie ou encore les Français Samuel Umtiti et Kylian Mbappé.

Footballeurs drogués à la nicotine

Comment cela explique-t-il l’engouement des footballeurs pour le snus ? Surtout si l’on considère que ce produit est illégal dans les principales nations européennes du football. Jean-Pierre de Mondenard, médecin du sport et spécialiste du dopage, apporte une partie de la réponse dans un article du Monde. « La nicotine est un stimulant et un relaxant. Elle supprime l’appétit, améliore la concentration et augmente la sécrétion de stéroïdes surrénaliens (…) Elle peut apporter un certain bénéfice dans différents sports d’adresse et de précision ».

À LIRE  Cajarca. Le club de judo d'Oc revient sur les tatamis

La nicotine présente dans le snus sert donc d' »agent dopant » aux footballeurs, tout en passant sous le radar des instances sportives officielles. Selon Jean-Pierre de Mondenard, les stars du football sont loin d’être les seules à se doubler de nicotine. Skieurs, basketteurs, volleyeurs, patineurs, rugbymen, footballeurs américains, gymnastes, lutteurs… Une quarantaine de sports sont concernés, selon une étude réalisée par des chercheurs suisses en 2011.

Pour quelques minutes de détente

Les sportifs ne sont pas les seuls à succomber au snus. Les jeunes semblent également trouver un certain attrait à cette alternative au tabac classique, et même les non-fumeurs. Mais avec eux, l’effet recherché est totalement différent. Ils ne consomment pas de snus pour augmenter leur concentration et leurs performances. Il semble qu’ils y voient un moyen de se détendre et de créer des moments de bien-être.

Placer un sachet de snus directement sur les gencives (dont la peau est extrêmement fine) décuple l’effet de la nicotine, et donc libère des endorphines plus rapidement et plus intensément qu’avec une cigarette. Le snus servait de complément lors d’une soirée, comme l’alcool ou les drogues douces. Mais ses effets sont plus courts, de l’ordre de quelques minutes.

Il n’y a pas de chiffres sur la consommation de snus en France ou ailleurs dans l’Union européenne, le produit est interdit à la vente. En Suède, d’où il est originaire, le snus serait très populaire. Un million de Suédois en consomment chaque jour (sur une population de dix millions).

Pour quantifier la grandeur du snus, il faut aller sur les réseaux sociaux, et notamment sur TikTok. Le #snus est mentionné un milliard de fois, dans des vidéos en plusieurs langues européennes… dont le français. Vous pouvez voir des jeunes essayer (souvent) ce tabac oral pour la première fois. Un peu comme essayer un nouveau médicament. La plupart des gens ne semblent pas se sentir bien. Vomissements, chaleur, vertiges sont les effets (indésirables) les plus ressentis si l’on se fie aux nombreux commentaires des tiktokeurs. Certains prétendent même qu’ils se sont sentis malades, voire qu’ils ont dû se rendre aux urgences.

Il faut dire qu’un sachet de snus contient de la nicotine à forte dose, l’équivalent de deux à dix cigarettes selon le produit acheté. D’où cette sensation de vertige (comme les premières cigarettes). « Dans ces sachets, on a des dosages différents donc on peut passer de trois milligrammes à des dosages de vingt milligrammes de nicotine par sachet. A titre de comparaison, quand on consomme une cigarette, on a entre un et deux milligrammes de nicotine pour chacun. cigarette fumée », explique Adrien Meunier, infirmier tabac au CHR de la Citadelle à Liège au site belge RTL Info.

À LIRE  Fin de vie : Marion Maréchal évoque une "remise en cause de l'interdiction de tuer"

Une porte pour les cigarettes ?

De plus en plus de professionnels de la santé mettent en garde contre les dangers pour la santé du snus ou de son cousin américain, le snuff (ou dip). Si cette forme de tabac ne provoque pas de cancer du poumon comme la cigarette, elle peut provoquer des cancers de la bouche, du pharynx et du pancréas, ainsi que des problèmes intestinaux et dentaires, sans compter les risques de lésions au niveau des gencives dues au tabac irritant.

Et même la version sans tabac du snus reste un problème. Si ce substitut cause moins de dommages à la santé que la cigarette, il pose le problème de la dépendance à la nicotine, la substance chimique qui rend le tabac addictif. Depuis de nombreuses décennies, des politiques de santé ont été mises en place dans différents pays pour éloigner les jeunes de la cigarette. Avec un certain succès. Au cours des trente dernières années, la prévalence du tabagisme a diminué de 26 % chez les Français âgés de 15 à 24 ans, selon une étude du Lancet. L’image de la cigarette est également devenue obsolète.

Mais comme la cigarette classique a mauvaise presse, des alternatives plus « fun » sont apparues sur le marché, comme les puffs (cigarettes électroniques jetables aux saveurs qui plaisent aux jeunes). Snus s’appuie sur un marketing assez similaire. Il est disponible dans une grande variété de saveurs et emballé dans des boîtes colorées.

Reste le problème de la dépendance à la nicotine qui fait craindre aux médecins que ces jeunes devenus dépendants à cette substance ne se mettent plus facilement à la cigarette. Sans oublier l’augmentation des risques cardiovasculaires et les additifs présents dans les différents parfums dont les conséquences sur la santé ne sont pas totalement connues.