L’auto-école (ou plateforme) en ligne En voiture Simone annonce une croissance importante au 2ème semestre 2021. Alors que les étudiants avec le code et les fonds affluent, les auto-écoles plateformes n’ont pas encore convaincu : leur part de marché reste modeste, alors que les tribunaux risquent retardant leur croissance.
Pour faire des économies, faites vos courses en ligne ou encore… passez votre permis de conduire ! La plateforme d’auto-école En voiture Simone connaîtrait un véritable engouement : « Alors qu’elle comptait 700 000 utilisateurs lors de sa reprise par Cosmobilis en juillet dernier, l’auto-école en ligne lancée par Edouard Rudolf et Edouard Polèse en 2015 vient de dépasser la barre des 1,1 million d’aspirants conducteurs accompagnés depuis sa création, annonçait l’entreprise début février 2022. Soit 400 000 nouveaux utilisateurs en l’espace de 6 mois, alors que dans le même temps, « les effectifs se sont considérablement étoffés (+30 %) et continueront à grandir en 2022″ poursuit la jeune pousse. La clé du succès ? « Une offre accessible au plus grand nombre, le pack autorisé est 35% moins cher que dans une école traditionnelle », annonce En voiture Simone…
Bien que les tarifs affichés soient clairement attractifs, il ne faut pas oublier que la réussite d’une auto-école se mesure avant tout par sa fréquentation et son taux de réussite (rapport du nombre de permis B obtenus par rapport au nombre d’élèves présentés) . En voiture Simone aurait donc récemment connu une vague de nouveaux clients : « Ce résultat est principalement lié aux efforts sur la plateforme dédiée au code », annonce Edouard Polèse, « l’année dernière, nous avons opéré un changement en proposant le code gratuit, de plus en plus, il est connu de bouche à oreille ». Ainsi, les +57% d’utilisateurs de En voiture Simone sont essentiellement constitués de personnes ayant créé un compte gratuitement : « Parmi ces utilisateurs, il y en a aussi qui se convertissent en cours de conduite », précise le co-fondateur du auto-école en ligne.
Le secret de la réussite
En voiture Simone réclame de plus en plus d’utilisateurs qui ne lui rapporteront probablement jamais d’argent, mais aussi un taux de réussite secret… de ses collègues embellirait un peu trop la réalité à son goût. Surtout, « le taux de réussite est présenté comme un taux global » et de l’avis du responsable, « il est dommage qu’il ne prenne pas en compte plusieurs critères, comme le nombre d’heures de conduite avant l’obtention, le prix payé, etc…
Pour le président de la branche « Professeurs de conduite » de Mobilians (ex-CNPA), les auto-écoles de plateforme avoueraient ainsi leurs faiblesses : « Les auto-écoles de plateforme racontent de belles histoires parce qu’elles ne sont pas rentables et sont infusées soit avec de l’argent public, soit via des collectes de fonds » , grince Patrice Bessone, lui-même dirigeant d’une auto-école, « ils représentent 4% du marché et ont un taux de réussite de 35%. Pour nous, les auto-écoles de proximité, c’est 65% de réussite… » Le bilan permis de conduire 2020 ( 2021 n’est toujours pas disponible à ce jour) tempère quelque peu ces chiffres. Certes, 4 % des élèves du permis de conduire se sont présentés comme candidats indépendants, mais le taux de réussite de ces derniers a été de 45 %, contre 60 % de réussite pour les élèves présentés par une auto-école classique. Les candidats indépendants ont certes un taux de réussite inférieur, mais il serait également inexact de dire que seuls les candidats issus des auto-écoles de la plateforme se présentent librement. Le vrai taux de réussite d’En Voiture Simone et des autres auto-écoles en ligne reste donc un fait bien gardé !
Le principe d’une auto-école en ligne est de ne pas avoir de locaux. Hormis un siège social, ces auto-écoles du nouveau millénaire entendent n’être disponibles dans toutes les villes de France que grâce à leur réseau de moniteurs : « Nous voulons être présents dans les 30 plus grandes villes d’ici fin 2022 » prévient Edouard Polèse, « Le Mans, Poitiers, puis on arrivera aussi en fin d’année à Perpignan, Mulhouse, Valenciennes… ». Selon la co-fondatrice de By car Simone, « nous essayons de maîtriser ce réseau car nous avons beaucoup de demandes d’enseignants » qui souhaiteraient l’intégrer. Il faut savoir que les auto-écoles en ligne ne paient pas leurs moniteurs. Ces derniers sont indépendants, pour la plupart indépendants, et travaillent avec leur propre voiture, généralement louée.
Tribunaux retors
Pourtant, ce qui fait la force de ces auto-écoles en ligne (peu de salariés donc moins de frais fixes) pourrait bien devenir un jour l’élément qui signera leur fin. Les tribunaux se sont déjà penchés sur la question. En novembre 2018, le tribunal de Lyon a estimé que les moniteurs qui travaillaient pour le compte de l’auto-école Le permis libre « en faisaient des salariés de l’entreprise et non des auto-entrepreneurs ». Trois mois de fermeture administrative lui avaient été imposés, avant que le tribunal de Lyon ne suspende cette décision. Plus récemment, un moniteur travaillant pour Ornikar, une auto-école de plate-forme, a déposé une plainte auprès du tribunal de Bobigny pour faire également requalifier son statut de salarié. Après des atermoiements, le tribunal a botté en touche et renvoyé l’affaire, le litige n’est toujours pas réglé à ce jour.
Et plus que le risque de jurisprudence si la justice française tranche en faveur des instructeurs plaignants, une autre épée de Damoclès attend les dirigeants des auto-écoles en ligne. La Commission européenne s’apprête à présenter une directive traitant du statut juridique de tous ces salariés des plateformes numériques. Edouard Polese est d’accord. Si demain la loi oblige à embaucher des moniteurs désormais indépendants, « on va les intégrer, ça ne remettra pas en cause notre existence. Mais ça va changer nos façons de faire et ralentir notre croissance. »