L’inflation des prix en Tunisie continue crescendo, et même augmente. En novembre 2022, les prix à la consommation augmentent de 0,6 % après 1 % en octobre, et la liste est longue. Hausse des prix des œufs (+7,5%), des légumes (+6,1%), des produits laitiers et fromagers (+3,4%), des huiles alimentaires (+3%) ; en revanche, les prix de la volaille sont en baisse de 10,6 %.
Les prix des services de transport ont augmenté de 0,6 %. Les prix des biens industriels ont augmenté de 9,8 %, les matériaux de construction ayant augmenté de 10 %, les produits vestimentaires de 9,5 % et les produits d’entretien ménager de 9,9 %. Pour les services, la hausse des prix de 6% sur un an s’explique principalement par une hausse de 9,8% des prix des restaurants, cafés et services hôteliers.
Et ce n’est pas la hausse des salaires qui alimente la croissance de l’inflation, qui frôle désormais les deux chiffres (9,8%), ni la valeur de l’euro à 3,3656 DT, qui est aussi l’effet dans la courbe d’inflation d’une économie de transformation , ça arrangera les choses.
L’ensemble du chef de l’Etat se déplace enfin, plus sereinement et avec moins de propos, recevant autres que les habituels ministres de l’intérieur et de la justice, le premier toujours accompagné de la direction générale de la sécurité intérieure et le second parfois en compagnie de sa cuisinière. Il est peut-être maintenant plus conscient qu’en temps de crise pour les produits existentiels, la sécurité et la justice telles qu’il les imagine passent au second plan.
Depuis quelques jours, Kais Saïed voit du monde. Mais alors que tout le pays attend la LF 2023 pour mesurer la force de la mâchoire de la politique budgétaire qui va mordre les poches et sur laquelle le ministre Nemsia fait un black-out complet, Saïed accueille son homonyme, le ministre du Plan, comme s’il voulait soudain voir au-delà de l’urgence du présent et au-delà du nez des politiciens.
Et bien qu’on l’attende plutôt au marché central de Tunis ou au marché de gros de Bir El Kassaa pour comprendre le labyrinthe des circuits de distribution, il savoure une promenade dans les souks de la médina, flânant sur le toit de Tunis qu’est l’édifice de l’ancien RCD rebaptisé « Tour de la Nation » qui bloque toute circulation, ou parcourir les vieux manuscrits du collège Sadiki qui ne feront qu’enrichir son lexique « ikhchidien ».
On aimerait le voir plutôt à l’Institut National de la Consommation (INC), pour réactiver le slogan « consommer tunisien » signé depuis près de 6 mois avec l’ODC, et obliger l’INC à publier son document mensuel de comparaison des prix, pour aider les consommateur de savoir où il peut acheter moins cher. Ou même auprès de l’ODC (Consumer Defence Organization) pour ordonner qu’il soit autorisé à intenter une action civile en recours collectif contre des augmentations de prix inutiles. Mais cela ne semble pas être une de ses priorités. Donner le dessus aux travaux de construction de l’autoroute Tunis-Jema, en agitant un mini-drapeau sous la poussière des engins de chantier, apportera peut-être des voix aux prochaines législatives, mais ne fera pas baisser les prix !
Depuis le pic de juillet 2021 de 5,7% et qui sera suivi de mois de pénuries, le taux d’inflation démentiel continue d’augmenter, toujours plus haut. Elle est désormais sur le point de franchir le Rubicon fatidique de l’inflation à deux chiffres.
Ceci, malgré les menaces du président de lutter contre la vie chère « avec le feu et le fer », comme il l’a dit dans une usine de Bir Mcherga, ou ses tentatives de « promouvoir » des prix sur le marché parallèle d’Aousja moins chers qu’au souks habituels.
Une approche présidentielle, digne des néophytes les plus célèbres, et niant obstinément l’impact des crises, du Covid et de la guerre russe en Ukraine, ainsi que l’impératif crucial pour les entreprises locales d’augmenter les prix, pas les marges. Une approche qui préfère à cette dure réalité le confort du complot et du silence ordonné à tous les niveaux de son gouvernement sans exception.
INS et BCT l’avaient déjà dit et démontré depuis novembre dernier, les chiffres têtus montrent qu’il n’est pas question d’importer moins pour avoir des prix plus bas. La hausse des prix est la faute de Covid et de la Russie. Les pénuries, en revanche, sont en grande partie à la charge d’un État qui manque de ressources financières, qui se retrouve à rationner ses propres dépenses, et qui préfère dépenser 70 MDT pour des élections qui n’apporteront rien de nouveau à la Tunisie plutôt que de rembourser les dettes des fournisseurs de des médicaments ou d’autres biens de consommation importants. Ou utilisez-les dans le cadre d’un programme national de sobriété énergétique.
Saïed est peut-être un bon président, mais un mauvais chef d’État qui ne réagit qu’en politicien et ne mesure pas l’effet de ses actes et de ses paroles sur l’économie de tout un pays. Et la responsabilité de la rareté et de la hausse des prix repose donc sur lui et son système de gouvernance en 1ère position !