Rosa Bonheur, la peintre oubliée, revient sur la devanture du musée d’Orsay à Paris.

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Written By MilleniumRc

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Après une éclipse d’un siècle, la peintre animalière Rosa Bonheur, connue des deux côtés de l’Atlantique en son temps, est redécouverte au musée d’Orsay, qui présente la rétrospective exposée à Bordeaux au printemps dernier (jusqu’au 15 janvier). , 2023).

Après le musée des Beaux-Arts de Bordeaux, la grande exposition est consacrée à Rosa Bonheur à Paris, au musée d’Orsay. L’occasion de découvrir cette femme à la personnalité exceptionnelle, qui a tenté de capter les émotions des animaux, son sujet de prédilection.

Rosa Bonheur (1822-1899) est née il y a 200 ans à Bordeaux. C’est à cette occasion qu’est organisée la rétrospective d’une artiste prolifique qui a su se faire reconnaître des deux côtés de l’Atlantique, avant de tomber dans l’oubli au XXe siècle, qui la trouvait trop académique.

Deux lapins semblent trembler sur la toile. L’un renifle une carotte tandis que l’autre nous regarde déjà du coin de l’œil. Ce tableau, accroché au début de l’exposition, a été peint par Rosa Bonheur alors qu’elle avait à peine 18 ans. Il est remarqué en 1841 au Salon où elle participe pour la première fois. C’est déjà le début de la reconnaissance. Non loin de là, un portrait de son frère Auguste en 1848, la montre en jeune femme fière, avec sa palette et ses sculptures.

Rosa Bonheur, « Deux Lapins », 1840, Bordeaux, Musée des Beaux-Arts, legs de François Auguste Hippolyte Peyrol, 1930 (© Mairie de Bordeaux, Musée des Beaux-Arts, photo F.Deval)

Car Rosa Bonheur est née dans une famille d’artistes. Son père Raymond Bonheur lui apprend le dessin et elle perfectionne cette formation des plus académiques en copiant les maîtres du Louvre. Très vite, elle se tourne vers la peinture d’animaux. C’est doublement avec le temps. Tout d’abord à cause de son attention envers les animaux. Et puis pour son indépendance. Elle n’est pas militante, mais a su conduire son propre bateau toute sa vie et est devenue une icône du féminisme.

Rosa Bonheur est devenue orpheline de sa mère à 11 ans et a reçu une éducation émancipatrice de son père, disciple de Saint-Simon. Elle ne se mariera jamais, saura vivre sa vie de femme libre dans un monde où les femmes sont attachées à la vie de famille et sont autorisées à porter des pantalons pour son travail sur le terrain. Elle vit avec une femme, Nathalie Micas, depuis près de 40 ans dans le château qu’elle a pu acquérir grâce à son succès commercial à Thomery (Seine-et-Marne). A la fin de sa vie avec une jeune peintre américaine, Anna Klumpke.

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Dans la vingtaine, Rosa Bonheur peint des scènes agricoles montrant les travailleurs de la terre, mais ce sont les animaux qui concentrent son attention. Elle mène de nombreuses études qui montrent sa maîtrise du dessin. Elle leur était très attachée et les a gardés toute sa vie.

Rosa Bonheur, « Labourage nivernais », dit « Le naufrage », 1849, Paris, musée d’Orsay (Photo © Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt)

On notera à Orsay son monumental Labourage nivernais, œuvre qui a véritablement fait décoller sa carrière. Il a été commandé par l’État en réponse à la médaille d’or qu’il a reçue au Salon de 1848. Un tableau monumental dans lequel deux attelages de trois paires de bœufs chevauchent en biais, les pieds enfoncés dans le sol, sous la baguette du paysan. Pour le mener à bien, elle se rendit dans le champ pour observer les différents bovins. On sent le lent mouvement et l’effort des animaux. On sent aussi la douleur dans l’œil ahuri que nous lance le bœuf au centre de la scène. Et quand les animaux sont peints en détail, les hommes qui les enlèvent sont plus flous. Avec ce tableau, l’artiste fait un triomphe au Salon de 1853.

Rosa Bonheur lance alors le projet d’une peinture sur un marché aux chevaux qui connaîtra un succès phénoménal. Pour ce tableau, elle se rend deux fois par semaine pendant un an et demi au marché aux chevaux du boulevard de l’Hôpital pour se rapprocher de son sujet et réalise des centaines d’études dessinées et peintes dans lesquelles on sent la vulnérabilité de l’homme face à la puissance de l’animal en révolte.

La version finale de 1853, mesurant 5m sur 2,4m, conservée au Metropolitan Museum of Art de New York, n’a pas fait le déplacement. Mais on peut voir dans l’exposition une réduction de taille qu’elle a faite pour une gravure. Et puis une rareté, récemment découverte, bien lovée, dans le grenier du Château de By où l’artiste a vécu pendant 50 ans. C’est le dessin réalisé à la taille de l’oeuvre, sur la toile, et qui a dû disparaître sous la peinture (l’artiste a adapté son projet et a ainsi changé la toile). Le succès de ce travail lui vaut de nombreuses affectations à l’étranger.

Rosa Bonheur (1822-1899), « Barbaro après la chasse », vers 1858, huile sur toile (© Philadelphia Museum of Art, USA)

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Si Rosa Bonheur est restée dans les mémoires comme une peintre de vaches, elle s’est également intéressée à toutes sortes d’animaux. La plupart de ceux qu’elle représentait, elle les côtoyait quotidiennement. C’est une véritable ménagerie qu’elle accueille sur le domaine du Château de By, acheté en 1860. Elle y vit avec des chiens, des chevaux, des moutons, des cerfs, des sangliers et aussi quatre lions. Elle fait de vrais portraits de ses animaux, frappant toujours l’œil qui nous regarde.

Elle multiplie les études et ses portraits sont souvent d’un réalisme quasi photographique. On croirait voir palpiter les muscles de son beau chat sauvage. Elle capture toutes les poses d’un chien dans une belle gamme de couleurs pastel. En même temps, sa famille de lions, le mâle allongé à côté de la femelle et les petits sont complètement idéalisés. Un étonnant aigle, figé en vol, réalisé en 1870 en pleine guerre franco-prussienne, semble évoquer la blessure française.

Rosa Bonheur a également pratiqué la photographie : dans l’exposition on voit des cyanotypes (plans) rehaussés au crayon, à l’aquarelle ou à la gouache blanche.

Rosa Bonheur (1822-1899), Sans titre, vers 1892, dessin sur cyanotype (© Château de Rosa Bonheur, Porte, Thomery)

L’exposition évoque également ses voyages dans les Pyrénées ou en Ecosse, et sa passion pour les chevaux, les bisons et les indigènes de l’Ouest américain, qu’elle a pu rencontrer lors du passage de Buffalo Bill avec son Wild West Show. l’exposition universelle de Paris en 1898.

« Contrairement à beaucoup d’autres expositions, celle-ci n’est pas le fruit d’années de recherche, mais plutôt un lancement », confie bordelaise Leïla Jarbouai, conservatrice en chef des arts graphiques et de la peinture au musée d’Orsay et co-commissaire de l’exposition. « Quand on a commencé notre travail, il n’y avait presque rien en France sur Rosa Bonheur. Il y a des études outre-Atlantique, le Château de By travaille sur ses archives, on essaie de faire écrire des thèses à des étudiants sur l’artiste. Il y a encore un beaucoup de choses à creuser », a-t-elle promis, évoquant les sujets de la photographie et le travail que Rosa Bonheur pourrait partager avec d’autres comme son frère ou Nathalie Micas.

Rosa BonheurMusée d’OrsayEsplanade Valéry Giscard d’Estain, 75007 ParisTous les jours sauf le lundi, de 9h30 à 18h, le jeudi jusqu’à 21h : 4516 € / 13 €Du 18 octobre 2022 au 15 janvier 2023