Santé. Strasbourg, un hôpital à bout de souffle

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Strasbourg (Bas Rhin), correspondance.

Même si l’on est encore loin de la situation d’avril 2020, lorsque les hôpitaux de Strasbourg étaient à la pointe de la lutte contre l’épidémie en France, recevant jusqu’à 600 malades du Covid, dont 200 en réanimation, la courbe des hospitalisations continue de monter inexorablement aujourd’hui : 155 personnes en fin de semaine dernière, deux fois plus qu’il y a un mois.

« Quelque chose qu’on n’a jamais vu »

Sur les 108 lits de réanimation opérationnels à Strasbourg, 48 sont occupés par des patients Covid et 50 par des patients atteints d’autres pathologies. Il reste une dizaine de lits de réanimation disponibles, dans un contexte où la flambée épidémique dans le Bas-Rhin est la plus forte de la Grande-Est, notamment dans la métropole de Strasbourg, où plus de 2.600 nouveaux cas de Covid ont été enregistrés par an. 100 000 habitants. . compté à la fin de la semaine dernière.

«  On est vraiment dans quelque chose qu’on n’a jamais vu  », observe Alexandre Feltz, adjoint de santé au maire de Strasbourg, pour qui, malgré la vaccination et bien qu’Omicron soit un peu moins morbide, la flambée de contamination augmente statistiquement les hospitalisations dans un contexte déjà mis à rude épreuve par la grippe saisonnière, d’autres infections virales ou des maladies chroniques.

Le Ségur n’a pas compensé le manque de personnel

Les hôpitaux universitaires de Strasbourg eux-mêmes transmettent les témoignages de médecins et infirmiers qui avouent être au bord du gouffre. « C’est vrai que la situation est tendue, avec des équipes fatiguées après deux ans de travail intense, et qu’elles n’en voient pas le bout », reconnaît le président de la commission médicale des hôpitaux de Strasbourg, Emmanuel Andrès.

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«  La tension est extrême pour de multiples raisons qui ne sont pas forcément liées au Covid, mais qui se sont aggravées avec la pandémie  », explique Alexandre Feltz, qui cite, parmi les causes de la situation actuelle, le manque de personnel et d’infirmiers non rémunérés par le Ségur de la santé, le manque ponctuel de lits de réanimation et le manque d’attractivité général des hôpitaux publics. «  La réalité structurelle des hôpitaux publics, c’est qu’ils ont dû fermer des lits par manque de personnel  », assure-t-il.

Pierre Wach, secrétaire général de la CGT des Hôpitaux universitaires de Strasbourg, estime à 70 le nombre de postes d’infirmiers actuellement vacants à Strasbourg qui ne trouvent pas de postes vacants. Une situation qu’il attribue à la dégradation des conditions de travail renforcée par la crise sanitaire. « La vie des infirmières, valable aussi pour les aides-soignantes, a toujours été compliquée, avec du travail posté, des nuits, des week-ends, mais avant le Covid, on a essayé de trouver un juste milieu entre vie professionnelle et vie de famille. Aujourd’hui, on les appelle à toute heure du jour ou de la nuit car il n’y a pas assez de monde. A force de toujours s’en souvenir, c’est l’épuisement », observe-t-il.

Les opérations non urgentes reportées

Selon Emmanuel Andrès, l’absentéisme a légèrement augmenté, touchant désormais 10 à 12 % des 13 000 salariés des hôpitaux strasbourgeois. Mais ce qui l’inquiète dans les semaines à venir, c’est que la contamination du personnel suivra la contamination générale (au Royaume-Uni, 20 à 25 % du personnel médical sont touchés par le Covid). «  Le risque est de devoir fermer des lits ou qu’un infirmier, au lieu de s’occuper de 10 à 12 lits, soit obligé d’en prendre 15 ou 16. Ce serait terrible pour l’équipe », a-t-il dit.

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Dans ce contexte de tension hospitalière, la déprogrammation des opérations a déjà commencé. «  Les opérations urgentes sont prises en charge, mais tout ce qui n’est pas urgent est reporté, sans doute pas de perte de chance, car les choses peuvent s’aggraver en cas de pathologies comme le cancer ou les maladies cardiaques  », note l’assistante de santé strasbourgeoise, qui est également médecin de ville. « C’est clair que je suis inquiet, on est déjà sous pression et on ne pourra pas faire plus », confie Emmanuel Andrès. Et rappelons que 90% des patients en réanimation ne sont pas vaccinés, et qu’il faut plus que jamais respecter les gestes barrières et se faire vacciner pour ne pas aggraver la très forte tension qui pèse sur les hôpitaux publics de Strasbourg.