Arrêtées en Australie pour trafic de drogue à l’issue d’une croisière largement documentée sur leurs réseaux sociaux, les Québécoises Isabelle Lagacé et Mélina Roberge ont attiré l’attention des médias du monde entier en 2016. Six ans plus tard, et après avoir passé du temps en prison, elles sont arrivées à nouveau se retrouvent sous les projecteurs, mais cette fois pour que chacun raconte sa version de l’histoire.
« C’est facile de dire [que j’étais] une escorte, une star du porno ou quoi que ce soit. Mais non. […] Si j’avais eu un sugar daddy, je n’aurais pas accepté une croisière pour transporter de la poudre à canon », indique Isabelle Lagacé dans la nouvelle série documentaire Cocaine, Prison & Likes: Isabelle’s True Story.
Presque tout le monde connaît son histoire, tant on a écrit sur elle à l’été 2016. La jeune femme menait alors une belle vie à bord du Sea Princess, un paquebot de croisière de luxe qui a fait le tour du monde pendant 49 nuits. Le rêve s’est transformé en cauchemar lorsqu’elle et sa compagne de voyage, Mélina Roberge, ont été menottées à la fin de leur périple à Sydney. Dans leur cabine, plus de 30 kilos de cocaïne ont été retrouvés. Le couple se cachait dans celui d’un autre Québécois à bord, André Tamine, 64 ans, également arrêté.
Un procès très médiatisé a suivi, au cours duquel les deux Québécois ont plaidé coupable et ont écopé d’une peine de plus de sept ans de prison australienne.
À l’époque, les médias du monde entier adoraient cette histoire digne d’un film. Mais parmi les enquêtes détaillées, les rumeurs les plus folles ont également circulé dans les magazines populaires.
C’est justement pour « remettre les pendules à l’heure » qu’Isabelle Lagacé a accepté de se lancer pour la première fois devant la caméra. « Je voulais vous dire ce qui m’a vraiment amenée à faire ces choix », a-t-elle déclaré lors d’une conférence de presse.
Le documentaire en trois épisodes plonge ainsi dans toute la saga, mais aussi dans le passé de la Québécoise, pour comprendre ce qui l’a amenée à accepter de devenir une « mule » pour un réseau international de trafic de drogue.
« J’étais clairement déprimé par tous les événements passés. Relations toxiques, problèmes financiers… J’en avais marre de mon travail, je ne savais pas où j’allais. Je voulais juste reconstruire ma vie et avoir une issue. J’ai senti que cette somme d’argent m’aiderait à me remettre sur pied et à changer ma vie », dit-elle à l’écran.
On apprend en privé dans le premier épisode que c’est une cliente du bar où elle travaillait comme serveuse sur la Rive-Sud qui lui a fait cette offre « difficile à refuser » : une croisière tous frais payés d’une valeur de 20 000 $, et 100 000 $ pour contrebande. drogues à bord de votre cabine.
« Mon histoire, je ne l’avais racontée à personne. Donc, se replonger là-dedans était une thérapie en soi, dit-elle. Si nous pouvons [avec cette série documentaire] toucher certaines personnes qui pourraient se retrouver dans la même situation que moi et en même temps les aider, tant mieux. 🇧🇷
Un livre
Au début du projet, il était question d’inclure le point de vue de Mélina Roberge dans la série documentaire, mais elle a décliné la proposition. La jeune femme de 29 ans a expliqué au Devoir qu’elle avait déjà en tête de raconter sa propre histoire dans un livre.
Sa biographie, Sans filtre — écrite avec la journaliste du Journal de Montréal Claudia Berthiaume — a été publiée en septembre. Elle raconte comment son goût du luxe et son obsession de devenir riche et populaire l’ont amenée à être passeuse de drogue lors de cette fameuse croisière. Elle se remémore également les semaines passées sur le Sea Princess, son arrestation et son séjour dans diverses prisons en Australie.
« Le livre m’a permis de raconter mon histoire avec juste des mots. Cela permet aux gens de se concentrer uniquement sur ce que j’ai à dire sans être distraits par une image qu’ils peuvent forcément juger », explique Mélina Roberge.
Ses motivations sont similaires à celles d’Isabelle Lagacé : rectifier des faits mal rapportés, mais aussi avertir les autres femmes dans sa situation de ne pas s’engager sur cette pente glissante.
Une fiction
Outre une série de documentaires et un livre autobiographique, les tribulations des deux jeunes femmes ont également inspiré la création d’une fiction. Sugar, d’Amazon Studios, est une coproduction canado-mexicaine réalisée par Vic Sarin, mettant en vedette l’actrice canadienne Jasmine Sky Sarin et l’Américaine Katherine McNamara.
Pour ce film, ni Mélina Roberge ni Isabelle Lagacé n’ont été consultées. Alors qu’à l’émission Tout le monde en parle dimanche, celle-ci n’a même pas voulu donner son avis sur la fiction, se contentant de dire que c’était « loin de la réalité ».