Documentaire en libre accès émouvant et éclairant, Invisible Seams, couturières et créateurs travaillant dans les coulisses de la mode new-yorkaise alors que la pandémie de Covid a décuplé le racisme anti-asiatique.
« Nous disons souvent que lorsque les hommes [asiatiques] immigrent aux États-Unis, ils travaillent dans des restaurants. Lorsque les femmes font cela, elles travaillent à coudre des vêtements. Ce sont huit femmes d’origine asiatique qui sont apparues dans le documentaire Invisible Seams. Dans le quartier de la mode de New York, l’une des grandes capitales occidentales de la mode, ils s’affairent à créer des créations pour le compte des plus grandes marques. Ce document gratuit, filmé dans le contexte de la pandémie de Covid 19, montre aussi la montée du racisme anti-asiatique.
Un docu mode sur fond de racisme anti-asiatique
En effet, les grossièretés et les crimes contre les personnes d’origine asiatique ont fortement augmenté aux États-Unis (mais pas seulement). Au premier semestre 2021, le groupe de travail sur les crimes haineux du département de police de New York a constaté une augmentation de 73 % des crimes haineux par rapport à l’année précédente, les Asiatiques étant largement représentés cette fois. Dazed rapporte directement une explosion de 339% aux États-Unis tout au long de 2021. Dans ces médias britanniques, Jodie Chan, productrice exécutive d’Invisible Seams, raconte une terrible anecdote :
« Mon bureau est à Times Square. Là, une femme a été poussée sur les rails du métro. Je vais à cette gare tous les jours. Maintenant, je ne porte plus d’écouteurs quand je suis dans le train, je ne me tiens pas sur le quai jusqu’à l’arrivée du train. Ce sont des choses omniprésentes dans ma tête tout le temps. »
Un court-métrage intimiste et social sur les dessous de la mode à New York
C’est pourquoi Jodie Chan, une native de Hong Kong qui a étudié à Sydney avant d’étudier la mode à New York et d’y travailler, a voulu contribuer à la revalorisation des Asiatiques alors plus déshumanisés que jamais. Jia Li, le réalisateur, vient de réaliser un court-métrage intimiste et mondain sur un restaurateur asiatique aux prises avec un racisme décuplé par le Covid, Spicy Village. C’est ce qui a motivé Jodie Chan à lui proposer de faire quelque chose de similaire avec la mode. La page de présentation du documentaire diffusé en mai 2022 explique ce qui suit :
« Invisible Seams raconte les histoires de huit couturières et créateurs asiatiques différents à New York, peignant un portrait intime de leurs différents horizons alors qu’ils mélangent et tissent le tissu de l’industrie de la mode new-yorkaise. Du point de vue de la réalisatrice, Jia Li (Spicy Village), un court documentaire sur la vie de ces femmes fascinantes et talentueuses à travers leurs propres voix et histoires. »
Donner une voix et un visage aux petites mains de la mode
Plusieurs personnes témoignent ainsi dans Invisible Seams, en anglais, mais aussi dans d’autres langues maternelles, tout en jouant habilement avec l’aiguille, les ciseaux et la machine à coudre. Suffisamment honnêtes pour qu’ils s’expriment par des gestes et des paroles.
L’histoire de l’immigration à New York émerge en filigrane de ce document poétique et politique, alimenté notamment par les stéréotypes raciaux, dont le mythe de la minorité exemplaire. Comme bon nombre de ces personnes ne parlent pas nécessairement anglais et sont souvent dépeintes comme discrètes et précises, on les retrouve souvent dans les coulisses de l’industrie de la mode. Où tous ces gens qu’on appelle les « petites mains » sont en réalité loin d’être bêtes.
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