Un prix Nobel qui nuit à Israël et à ses plantes d’encens

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Par Mohamed Larbi Bouguerra – Le jury du prix Nobel de littérature a couronné l’écrivaine française Annie Ernaux le jeudi 6 octobre 2022, reconnaissant le courage de son œuvre – majoritairement autobiographique – faisant, à 82 ans, de cette femme engagée, figure féministe d’origine modeste, la première Française à remporter le prestigieux Prix fondé en 1901. Elle devient ainsi la 17e femme à remporter ce Prix après la poétesse américaine Louise Gluck en 2020.

Peu de Françaises ont eu cet honneur, mais on peut citer le cas de Marie Curie et de sa fille Irène pour les Prix de Physique et de Chimie, mais Marie Curie reste, à ce jour, la seule femme à avoir reçu deux fois le prestigieux prix.

Le lauréat, auteur de l’intimité où le domestique s’entremêle avec les conflits familiaux et les transferts de classe, a promis de « poursuivre le combat contre l’injustice ». « Dans son travail, elle explore constamment l’expérience de la vie marquée par de grandes inégalités en termes de genre, de langue et de classe », a souligné l’universitaire Anders Olsson, membre de l’Académie suédoise. Pour Le Monde, le Nobel d’Annie Ernaux « célèbre une œuvre intime et politique, admirable par sa constance, son intransigeance et son intensité. » (8 octobre 2022, p. 24-25)

Annie Ernaux est normande, issue d’un milieu prolétarien. Ses parents tenaient une modeste épicerie-marchand-café à Yvetot, sa ville natale. Elle a bénéficié de l’échelle sociale grâce à l’école même si elle a fréquenté un établissement catholique à Yvetot comme elle le raconte dans son livre « La honte ». Elle est devenue enseignante et donc transfuge de classe. Elle s’est toujours battue pour l’émancipation féminine. Elle est la porte-parole de la rébellion de classe conformément à la pensée du sociologue Pierre Bourdieu.

Le prix – dit-elle en substance – crée une « responsabilité » de continuer à lutter contre l’injustice « par rapport aux femmes et par rapport aux dominés », même si la littérature n’a pas forcément « d’action immédiate » pour changer les choses, a-t-elle déclaré lors d’une conférence de presse aux éditions Gallimard jeudi.

Avec ses nombreux livres – à la prose cristalline si ravissante – et appréciés du public, Annie Ernaux a longtemps été l’une des favorites du Nobel dans le monde littéraire, mais elle a assuré que c’était pour elle une « grosse surprise ».

« Je n’ai pas vraiment l’impression d’être courageuse, ce n’est pas du courage, c’est une nécessité », a-t-elle déclaré jeudi à propos de sa motivation pour le prix.

Le président français Emmanuel Macron n’a pas manqué de saluer la « voix » de « la liberté des femmes et des oubliées du siècle ». Annie Ernaux « écrit, depuis 50 ans, le roman de la mémoire collective et intime de notre pays ».

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Contre l’état voyou d’Israël et son apartheid

Annie Ernaux est une militante engagée pour la cause palestinienne. Comme Jean-Paul Sartre, elle n’est pas neutre. L’écrivain – qui a refusé le Nobel – n’a-t-il pas écrit, à l’époque, à propos du conflit israélo-palestinien : « … Nous ne pouvons plus rester neutres ; est-ce que nous vivons passionnément le conflit et que nous ne pouvons le vivre sans nous tourmenter constamment, l’examiner sous tous ses aspects et y chercher une solution » ? (in Dossier* « Le conflit israélo-arabe » dans Les Temps Modernes, 1967, p. 7).

Ainsi en 2018, Annie Ernaux dénonce, avec le cinéaste Jean-Luc Godard et 80 autres personnalités du monde de l’art, la saison franco-israélienne, une « vitrine » où la Culture sert la politique de l’État sioniste. de plus en plus sévère sur le violemment. Palestiniens occupés.

En 2019, elle dénonce l’Eurovision en Israël et annonce, avec d’autres artistes, qu’ils « n’iront pas à Tel-Aviv blanchir le système de discrimination et d’exclusion légale qui y sévit contre les Palestiniens, et appelle France Télévisions et la délégation française à ne pas ; servir de gage au régime israélien. Dans une tribune publiée le 7 juin 2021 sur Médiapart intitulée « Lutte contre l’apartheid : en soutien à la lutte palestinienne pour la décolonisation » et signée par Annie Ernaux, on peut lire : « Nous, les signataires • En tant qu’artistes, écrivains et créateurs palestiniens, et nos alliés culturels nommés ci-dessous, nous vous demandons de nous rejoindre. ….Nous vous demandons de nous rejoindre maintenant, en ce moment critique, et de montrer votre soutien public à la libération de la Palestine.

Nous exigeons la fin immédiate et inconditionnelle de la violence israélienne contre les Palestiniens. Nous exigeons la fin du soutien accordé par les puissances mondiales à Israël et à son armée ; notamment des Etats-Unis, qui apportent au pays une aide financière, à hauteur de 3,8 milliards de dollars par an, sans conditions. Nous demandons à chacun d’aider autant qu’il le peut à démanteler ce système d’apartheid. Nous appelons tous les gouvernements qui autorisent ce crime contre l’humanité à imposer des sanctions, à mobiliser les instances internationales responsables et à mettre fin à leurs relations commerciales et économiques. Nous appelons les militants et les citoyens, et en particulier nos pairs dans le domaine des arts, à encourager autant que possible leurs institutions et leurs lieux, à soutenir autant que possible la lutte palestinienne pour la décolonisation. L’apartheid israélien est soutenu par la complicité internationale. Il est de notre responsabilité collective de remédier à ce mal.

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Nous avons constaté que les gouvernements en Europe et au-delà mettaient en œuvre des politiques de censure et favorisaient une culture d’autocensure concernant la solidarité avec les Palestiniens. Cependant, il est cynique de confondre toute critique légitime de l’État d’Israël et de sa politique envers les Palestiniens avec l’antisémitisme. Le racisme, y compris l’antisémitisme et toutes les formes de haine, nous est odieux et n’est pas le bienvenu dans notre lutte. Il est temps de résister à ces tactiques de silence et de les vaincre. Des millions de personnes dans le monde voient les Palestiniens comme un microcosme de leur propre oppression et de leurs espoirs, et des alliés tels que Black Lives Matter et Jewish Voice for Peace, ainsi que des militants des droits des peuples autochtones, des féministes et des mouvements queer, entre autres. , exprime de plus en plus son soutien…

L’apartheid doit être démantelé. Aucun de nous n’est libre tant que nous ne sommes pas tous libres. »

Pendant la crise du coronavirus, Annie Ernaux, avec plus de 200 artistes, a appelé à la fin du siège imposé par Israël à Gaza.

Bien sûr, les partisans d’Israël tels que « The Times of Israel » – un journal israélien en ligne en anglais, arabe, chinois, hébreu – n’apprécient pas ces positions de l’écrivain engagé. Ils s’étouffent et vomissent ces mots : « Ernaux vient d’apparaître à la télévision sur France 5, où elle était au centre de l’attention. Indépendamment de sa belle plume, nous avons pu découvrir la dérive morale et intellectuelle de cette lectrice par ailleurs brillante. Ernaux est une néo -féministe, raciste, indigène, communiste, antisémite, décoloniale, néoécologique, pro-palestinienne, ennemie d’Israël et militante de la France Insoumise depuis 10 ans, elle est aussi fan du leader de ce parti islamo-gauchiste, Jean-Luc Mélenchon, qui aime aussi traîner avec des antisémites de leur parti ou d’ailleurs. »

« Antisémite » signifie ici « antisioniste » en réalité. C’est une façon courante de tromper les gens !

Quoi qu’il en soit, c’est la preuve que les positions d’Annie Ernaux pour la justice contre les discriminations et l’apartheid font mal aux partisans d’Israël tellement ils sont justes !

* Dans ce dossier, on peut lire (p. 345-358) l’article de notre regretté ami le Professeur Rachad Hamzaoui « Les relations Judéo-Arabes au Moyen-Age »